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Le sort de l'homme sur la terre est celui d'un soldat, Et ses jours sont ceux d'un mercenaire.

Comme l'esclave soupire après l'ombre, Comme l'ouvrier attend son salaire,

Ainsi j'ai pour partage des mois de douleur, J'ai pour mon lot des nuits de souffrance.

Je me couche, et je dis: Quand me lèverai-je? quand finira la nuit? Et je suis rassasié d'agitations jusqu'au point du jour.

Mon corps se couvre de vers et d'une croûte terreuse, Ma peau se crevasse et se dissout.

Mes jours sont plus rapides que la navette du tisserand, Ils s'évanouissent: plus d'espérance!

Souviens-toi que ma vie est un souffle! Mes yeux ne reverront pas le bonheur.

L'oeil qui me regarde ne me regardera plus; Ton oeil me cherchera, et je ne serai plus.

Comme la nuée se dissipe et s'en va, Celui qui descend au séjour des morts ne remontera pas;

10 Il ne reviendra plus dans sa maison, Et le lieu qu'il habitait ne le connaîtra plus.

11 C'est pourquoi je ne retiendrai point ma bouche, Je parlerai dans l'angoisse de mon coeur, Je me plaindrai dans l'amertume de mon âme.

12 Suis-je une mer, ou un monstre marin, Pour que tu établisses des gardes autour de moi?

13 Quand je dis: Mon lit me soulagera, Ma couche calmera mes douleurs,

14 C'est alors que tu m'effraies par des songes, Que tu m'épouvantes par des visions.

15 Ah! je voudrais être étranglé! Je voudrais la mort plutôt que ces os!

16 Je les méprise!... je ne vivrai pas toujours... Laisse-moi, car ma vie n'est qu'un souffle.

17 Qu'est-ce que l'homme, pour que tu en fasses tant de cas, Pour que tu daignes prendre garde à lui,

18 Pour que tu le visites tous les matins, Pour que tu l'éprouves à tous les instants?

19 Quand cesseras-tu d'avoir le regard sur moi? Quand me laisseras-tu le temps d'avaler ma salive?

20 Si j'ai péché, qu'ai-je pu te faire, gardien des hommes? Pourquoi me mettre en butte à tes traits? Pourquoi me rendre à charge à moi-même?

21 Que ne pardonnes-tu mon péché, Et que n'oublies-tu mon iniquité? Car je vais me coucher dans la poussière; Tu me chercheras, et je ne serai plus.

Bildad de Schuach prit la parole et dit:

Jusqu'à quand veux-tu discourir de la sorte, Et les paroles de ta bouche seront-elles un vent impétueux?

Dieu renverserait-il le droit? Le Tout Puissant renverserait-il la justice?

Si tes fils ont péché contre lui, Il les a livrés à leur péché.

Mais toi, si tu as recours à Dieu, Si tu implores le Tout Puissant;

Si tu es juste et droit, Certainement alors il veillera sur toi, Et rendra le bonheur à ton innocente demeure;

Ton ancienne prospérité semblera peu de chose, Celle qui t'est réservée sera bien plus grande.

Interroge ceux des générations passées, Sois attentif à l'expérience de leurs pères.

Car nous sommes d'hier, et nous ne savons rien, Nos jours sur la terre ne sont qu'une ombre.

10 Ils t'instruiront, ils te parleront, Ils tireront de leur coeur ces sentences:

11 Le jonc croît-il sans marais? Le roseau croît-il sans humidité?

12 Encore vert et sans qu'on le coupe, Il sèche plus vite que toutes les herbes.

13 Ainsi arrive-t-il à tous ceux qui oublient Dieu, Et l'espérance de l'impie périra.

14 Son assurance est brisée, Son soutien est une toile d'araignée.

15 Il s'appuie sur sa maison, et elle n'est pas ferme; Il s'y cramponne, et elle ne résiste pas.

16 Dans toute sa vigueur, en plein soleil, Il étend ses rameaux sur son jardin,

17 Il entrelace ses racines parmi les pierres, Il pénètre jusque dans les murailles;

18 L'arrache-t-on du lieu qu'il occupe, Ce lieu le renie: Je ne t'ai point connu!

19 Telles sont les délices que ses voies lui procurent. Puis sur le même sol d'autres s'élèvent après lui.

20 Non, Dieu ne rejette point l'homme intègre, Et il ne protège point les méchants.

21 Il remplira ta bouche de cris de joie, Et tes lèvres de chants d'allégresse.

22 Tes ennemis seront couverts de honte; La tente des méchants disparaîtra.